(162173) Ryugu

astéroïde
(162173) Ryugu
Description de cette image, également commentée ci-après
Ryugu.
Caractéristiques orbitales
Époque (JJ 2456800,5)
Établi sur 624 observ. couvrant 9567 jours (U = 0)
Demi-grand axe (a) 177,9 × 106 km
(1,189 5 ua)
Périhélie (q) 144,1 × 106 km
(0,963 18 ua)
Aphélie (Q) 211,8 × 106 km
(1,415 8 ua)
Excentricité (e) 0,190 27
Période de révolution (Prév) 473,86 j
(1,30 a)
Inclinaison (i) 5,884 0°
Longitude du nœud ascendant (Ω) 251,614°
Argument du périhélie (ω) 211,437°
Anomalie moyenne (M0) 322,371°
Catégorie Astéroïde Apollon
Paramètre de Tisserand (TJ) 5,308
Caractéristiques physiques
Dimensions 980 ± 29 m
Période de rotation (Prot) 0,317 8 ± 0,000 3 j
Classification spectrale C
Magnitude absolue (H) 19,2
Albédo (A) 0,06
Découverte
Plus ancienne observation de pré-découverte
Date
Découvert par LINEAR
Nommé d'après Ryūgū-jō
Désignation 1999 JU3

(162173) Ryugu est un astéroïde Apollon de type C potentiellement dangereux découvert en 1999 par le projet LINEAR et provisoirement désigné 1999 JU3. En 2018, on lui a découvert une activité cométaire[1].

Découverte, désignation et nom modifier

Ryugu a été découvert le par les astronomes grâce au Lincoln Near-Earth Asteroid Research, au Lincoln Laboratory's Experimental Test Site (en) (voir Laboratoire Lincoln), près de Socorro, au Nouveau-Mexique (États-Unis)[2]. Il a alors reçu la désignation provisoire 1999 JU3.

L'astéroïde a été officiellement baptisé Ryugu par le Centre des planètes mineures le dans la Minor Planet Circulars no 95804[3]. Ce nom fait référence au Ryūgū-jō (le palais du dragon) qui, dans la mythologie japonaise, est le palais sous-marin de Ryūjin, le dieu dragon de la mer. Dans l'histoire, le pêcheur Urashima Tarō voyage jusqu'à ce palais sur le dos d'une tortue et, lors de son retour, rapporte avec lui une mystérieuse boîte, rappelant donc la mission Hayabusa 2 revenant avec les échantillons de l'astéroïde[2],[4].

Caractéristiques modifier

L'astéroïde est une sphère grossière d'un diamètre d'environ 875 mètres (à 15 mètres près), mais sa forme est plutôt celle d'une toupie voire d'un diamant[5].

Sa période de rotation est de 7,63 heures. Son albédo est faible : 0,047[6].

Géographie et géologie modifier

Ryugu est couvert de nombreux rochers. Le plus gros d'entre eux est surnommé Otohime[7], d'après Otohime, princesse du palais Ryūgū-jō dans la légende japonaise de Urashima Tarō.

Le méridien origine est défini par le rocher Catafo Saxum[8].

Exploration modifier

Choix du site d'atterrissage modifier

Après une première sélection parmi 10 sites potentiels[9], le CNES et la DLR (agence spatiale allemande) déterminent un site d'atterrissage principal, nommé MA-9[10], dans l'hémisphère sud de l'astéroïde, ainsi que deux sites de secours[11],[12].

Déroulement de l'exploration modifier

(162173) Ryugu est la destination de la sonde spatiale japonaise Hayabusa 2, qui doit en prélever des échantillons. Elle se met en orbite le [13].

Le elle s'en approche à moins de 6 km. Les photographies révèlent une surface constellée de nombreux petits rochers, rendant difficile le choix d'un lieu d’atterrissage pour les robots d'exploration qui seront largués par la sonde en [14],[10].

Le , les premières images haute résolution de la surface de l'astéroïde sont prises par la camera ONC-T (Optical Navigation Camera - Telescopic) à l'occasion de la descente d'Hayabusa 2 pour le largage de la sonde MINERVA-II-1[15].

Le , deux micro-robots japonais MINERVA-II-1 et 2 atterrissent sur Ryugu. C'est la première fois que des rovers se posent sur un astéroïde. Le robot franco-allemand Mascot (Mobile Asteroid Surface Scout) les rejoint le [16],[17],[18].

Jeu concours modifier

À l'occasion de la mission Hayabusa 2, les agences spatiales organisent un jeu concours à l'intention des enfants en France, en Allemagne et au Japon. Ils doivent dessiner l'astéroïde dans l'une des trois catégories au choix : réalisme, humour et créativité[19]. Les gagnants sont désignés pour la France le [20].

Résultats de la mission Hayabusa 2 modifier

Les premières observations optiques de Ryugu par la sonde spatiale Hayabusa 2 débutent en juin 2018 mais les premiers résultats scientifiques sont communiqués en . Ryugu a la forme d'une toupie avec un épais bourrelet au niveau de l'équateur. La circonférence en passant par l'équateur est de 1 004 mètres alors qu'elle n'est que de 875 mètres en passant par les pôles (dans les deux cas à 4 mètres près).

L'astéroïde est en rotation rétrograde avec une période de 7,63 heures. L'axe de rotation est pratiquement perpendiculaire au plan orbital avec une inclinaison orbitale de 171,6 degrés. Son volume est de 0,377 km3 et sa densité est de 1,19. En partant de l'hypothèse qu'il est composé de chondrites carbonées — ce que semblent confirmer les images acquises par la caméra de MASCOT[21] —, de densité minimale 2,42, sa porosité est de 50 %. C'est un des objets les plus sombres jamais observés dans le système solaire (albédo compris entre 1,4 et 1,8 %). La surface est recouverte de rochers (2 fois plus que Itokawa), dans des proportions qui ont étonné l'équipe scientifique. Le plus important, baptisé Otohime, fait 160 mètres dans sa plus grande longueur.

Aucun satellite n'a pu être observé. La forme très symétrique de Ryugu (vu du pole il est presque parfaitement circulaire), pourrait être expliquée si l'astéroïde tournait plus rapidement dans le passé. Les cratères observables sur le bourrelet équatorial impliquent que cette formation est ancienne mais elle l'est moins que les zones situées aux latitudes intermédiaires. On dénombre à la surface de Ryugu une trentaine de dépressions circulaires de plus de 20 mètres de diamètre mais près de la moitié ne sont pas entourées d'un rebord et pourraient résulter de l'effondrement de la surface ou de l'éjection de celle-ci par les forces centrifuges[22].

Comme tous les astéroïdes de cette taille circulant sur une orbite de quasi collision avec la Terre, Ryugu n'est pas très âgé à l'échelle géologique. Ce type d’astéroïde est le fragment d'un astéroïde plus gros circulant dans la ceinture d'astéroïdes qui a éclaté à la suite d'une collision. L'orbite de Ryugu soumis à la fois à l'effet Yarkovsky et à l'effet YORP s'est progressivement rapprochée de celle des planètes internes. En étudiant les spectres des roches de Ryugu, les scientifiques japonais ont tenté de déterminer l'astéroïde parent. Les candidats les plus proches sont (142) Polana et (495) Eulalie mais les spectres sont légèrement différents. L'albédo particulièrement bas a surpris les scientifiques qui s'attendaient à une valeur comprise entre 3 et 4%. Aucune météorite identifiée sur Terre n'a un albédo aussi bas. La composition des roches à la surface de Ryugu semble très homogène. Tous les spectres montrent une petite quantité d'hydroxyde probablement présent dans un minéral argileux riche en magnésium. Cette composition indique que les matériaux présents ont interagi par le passé avec de l'eau. Cette composition et l'apparence (albédo) semblent indiquer que les roches qui forment Ryugu sont issues des couches internes d'un astéroïde de grande taille qui auraient subi une métamorphose thermique tout en étant infiltré par l'eau. Pour que ce processus se déclenche il fallait que cet astéroïde fasse quelques centaines de kilomètres de diamètre. Le réchauffement très important peut résulter soit de la décomposition radioactive de l'aluminium 26, soit d'un impact violent avec un autre astéroïde[22].

Au total, la sonde Hayabusa 2 a ramené sur Terre 5,4 g de poudre et de particules de roches de l'astéroïde Ryugu, dont 95 mg ont été analysés en 2022 par une équipe internationale (concentration de 66 éléments chimiques et composition isotopique de l'oxygène, du chrome et du titane). Ces matériaux sont très voisins de ceux des chondrites carbonées de type Ivuna, qui font partie des météorites les plus primitives (et les plus rares) des collections mondiales. Ils sont constitués de minéraux secondaires formés par altération aqueuse des minéraux primaires à basses température et pression (37 ± 10 °C, 0,06 atm) environ 5 Ma après la naissance du Système solaire. Ils n'ont par la suite jamais été chauffés à plus de 100 °C[23],[24]. Treize acides aminés et quatre amines aliphatiques ont été identifiés avec certitude (et leurs concentrations mesurées), et la présence de cinq autres acides aminés suspectée[25].

Notes et références modifier

  1. (en) Vladimir V. Busarev, Andrei B. Makalkin, Faith Vilas, Sergey I. Barabanov et Marina P. Scherbina, « New candidates for active asteroids: Main-belt (145) Adeona, (704) Interamnia, (779) Nina, (1474) Beira, and near-Earth (162,173) Ryugu », Icarus, vol. 304,‎ , p. 83-94 (DOI 10.1016/j.icarus.2017.06.032).
  2. a et b (en)Données orbitales de Ryugu sur le site du Minor Planet Center.
  3. (en)"Name Selection of Asteroid 1999 JU3 Target of the Asteroid Explorer Hayabusa2", sur JAXA, 5 octobre 2015
  4. (en)"Name Selection of Asteroid 1999 JU3 Target of the Asteroid Explorer Hayabusa2", JAXA, 5 octobre 2015
  5. (en) Tapan Sabuwala, Pinaki Chakraborty et Troy Shinbrot, « Bennu and Ryugu: diamonds in the sky », Granular Matter, vol. 23,‎ , article no 81 (DOI 10.1007/s10035-021-01152-z).
  6. (en) Paul Abell et all, « "Hayabusa 2" », , p. 13-14.
  7. B. Sharp, « Animation of #Ryugu's south pole remarkable megaboulder as seen by @haya2e_jaxa's navcam in different operationspic.twitter.com/Q2Qi6Po5Oy »,
  8. « Jan. 21, 2019. What's new », sur JAXA Hayabusa2 project
  9. « Choix du site d’atterrissage de Mascot : « un vrai challenge ! » », sur Hayabusa2/Mascot
  10. a et b « MA-9 : le site d'atterrisage de MASCOT sur l'astéroïde Ryugu », sur Hayabusa2/Mascot
  11. « Trois sites d’atterrissage sélectionnés pour la mission d’exploration de l’astéroïde Ryugu par Hayabusa2 », sur presse.cnes.fr
  12. Futura, « Hayabusa-2 : mission réussie pour Mascot après 17 h d'activité sur Ryugu », sur Futura
  13. « La sonde Hayabusa 2 transmet sa première image de l'astéroïde Ryugu », sur Science-et-vie.com, .
  14. « L'astéroïde Ryugu vu à moins de 6 km », sur Ciel & Espace
  15. (en)Images de la surface de Ryugu capturées par ONC-T (Optical Navigation Camera - Telescopic) d'Hayabusa 2, 27 septembre 2018
  16. (en) « MINERVA-II1: Successful image capture, landing on Ryugu and hop! », sur hayabusa2.jaxa.jp, .
  17. « Mascot, le robot-franco-allemand, a bien atterri sur l’astéroïde Ryugu », sur 20minutes.fr, .
  18. « REPLAY. Revivez l'atterrissage de l'instrument MASCOT sur l'astéroïde Ryugu, une étape cruciale d'Hayabusa 2 », sur sciencesetavenir.fr, (consulté le )
  19. « [Jeu-concours] « Dessine-moi l’astéroïde Ryugu » », sur SpaceGate
  20. « [Jeu-concours] Les gagnants de « Dessine-moi l’astéroïde Ryugu » sont... », sur SpaceGate
  21. (en) R. Jaumann, N. Schmitz, T.-M. Ho, S. E. Schröder, K. A. Otto et al., « Images from the surface of asteroid Ryugu show rocks similar to carbonaceous chondrite meteorites », Science, vol. 365, no 6455,‎ , p. 817-820 (DOI 10.1126/science.aaw8627).
  22. a et b (en) Emily Lakdawalla, « First Science Results from Hayabusa2 Mission », The Planetary Society,
  23. « Les échantillons de l’astéroïde Ryugu révèlent la composition la plus primitive du système solaire », sur INSU, (consulté le ).
  24. (en) Tetsuya Yokoyama, Kazuhide Nagashima, Izumi Nakai, Edward D. Young et Yoshinari Abe, « Samples returned from the asteroid Ryugu are similar to Ivuna-type carbonaceous meteorites », Science,‎ (DOI 10.1126/science.abn7850 Accès libre).
  25. (en) Eric T. Parker, Hannah L. McLain, Daniel P. Glavin, Jason P. Dworkin, Jamie E. Elsila et al., « Extraterrestrial amino acids and amines identified in asteroid Ryugu samples returned by the Hayabusa2 mission », Geochimica et Cosmochimica Acta, vol. 347,‎ , p. 42-57 (DOI 10.1016/j.gca.2023.02.017).

Voir aussi modifier

Bibliographie modifier

  • (en) Caractéristiques et simulation d'orbite de 162173 dans la JPL Small-Body Database.
  • Faith Vilas, « Spectral Characteristics of Hayabusa 2 Near-Earth Asteroid Targets 162173 1999 JU3 and 2001 QC34 », The Astronomical Journal, vol. 135,‎ , p. 1101 (DOI 10.1088/0004-6256/135/4/1101, Bibcode 2008AJ....135.1101V)
  • Hasegawa, Sunao; Müller, Thomas G.; Kawakami, Kyoko; Kasuga, Toshihiro; Wada, Takehiko; Ita, Yoshifusa; Takato, Naruhisa; Terada, Hiroshi; Fujiyoshi, Takuya; Abe, Masanao, « Albedo, Size, and Surface Characteristics of Hayabusa-2 Sample-Return Target 162173 1999 JU3 from AKARI », Publications of the Astronomical Society of Japan, vol. 60, no SP2,‎ , S399–S405
  • Abe, Masanao; Kawakami, Kyoko; Hasegawa, Sunao; Kuroda, Daisuke; Yoshikawa, Makoto; Kasuga, Toshihiro; Kitazato, Kohei; Sarugaku, Yuki; Kinoshita, Daisuke; Miyasaka, Seidai; Urakawa, Seitaro; Okumura, Shinichirou; Takagi, Yasuhiko; Takato, Naruhisa; Fujiyoshi, Takuya; Terada, Hiroshi; Wada, Takehiko; Ita, Yoshifusa; Vilas, Faith; Weissman, Paul; Choi, Young-Jun; Larson, Steve; Bus, Schelte; Mueller, Thomas « Ground-based observational campaign for asteroid 162173 1999 JU3 » (13–20 July 2008) (lire en ligne)
    37th COSPAR Scientific Assembly
  • H. Campins, J. P. Emery, M. Kelley, Y. Fernández, J. Licandro, M. Delbó, A. Barucci et E. Dotto, « Spitzer observations of spacecraft target 162173 (1999 JU3) », Astronomy and Astrophysics, vol. 503,‎ , p. L17 (DOI 10.1051/0004-6361/200912374, Bibcode 2009A&A...503L..17C, arXiv 0908.0796)
  • « Ground-based observational campaign for asteroid 162173 1999 JU3 » (March 10–14, 2008) (lire en ligne)
    Lunar and Planetary Science XXXIX
  • « International Symposium Marco Polo and other Small Body Sample Return Missions »

Articles connexes modifier

Liens externes modifier