Lu Shaye

diplomate chinois

Lu Shaye
卢沙野
Illustration.
Lu Shaye en 2021.
Fonctions
Ambassadeur de Chine en France
En fonction depuis le
(4 ans, 8 mois et 24 jours)
Prédécesseur Zhai Jun
Ambassadeur de Chine au Canada

(2 ans et 4 mois)
Prédécesseur Luo Zhaohui
Successeur Cong Peiwu
Ambassadeur de Chine au Sénégal

(3 ans et 10 mois)
Prédécesseur Cang Youheng
Successeur Gong Yuanxing
Biographie
Date de naissance (59 ans)
Lieu de naissance Nankin (Chine)
Nationalité Chinoise
Parti politique Parti communiste chinois
Diplômé de Université des affaires étrangères de Chine
Profession Diplomate

Lu Shaye, né en à Nankin (Jiangsu), est un diplomate chinois, ambassadeur de Chine en France et à Monaco depuis .

Carrière modifier

Il nait en 1964 à Nankin, dans la province du Jiangsu. Issu de la classe instruite, ses parents étaient médecins spécialisés dans la santé publique[1] au sein de la compagnie du chemin de fer de Nankin. Son père fait un séjour en prison pendant la révolution culturelle. Lorsqu'il entre au collège, la révolution culturelle est terminée. Francophile, il étudie le français au collège des langues étrangères de Nankin. Il a 15 ans en 1979, lorsque Deng Xiaoping lance les réformes d’ouverture. Il passe le Gaokao puis échoue à intégrer le département de littérature européenne de l'université de Pékin, mais est admis à l'université des affaires étrangères de Chine (en)[2].

Entre 1988 et 1991, il est attaché à l'ambassade de Chine en république de Guinée[3].

De 2005 à 2009, il est ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la république populaire de Chine en république du Sénégal. De 2009 à 2014, il est directeur général d'Afrique du ministère des Affaires étrangères. Il est maire adjoint de Wuhan, capitale de la province du Hubei, de 2014 à 2015. De 2016 à 2019, il est ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la république populaire de Chine au Canada[3], puis ambassadeur en France et à Monaco depuis .

Ambassadeur au Canada modifier

Lu Shaye dénonce « l'égoïsme occidental » et le « suprémacisme blanc » reprochant au gouvernement canadien et à ses alliés de s'intéresser au devenir de deux Canadiens arrêtés en Chine, mais pas à celui de Meng Wanzhou, directrice financière et fille du fondateur du groupe chinois Huawei, arrêtée au Canada[4]. Lu Shaye critique par ailleurs les journalistes canadiens « une profession pour laquelle les dirigeants communistes chinois ont très peu de considération » et conseille aux autorités canadiennes de négocier un accord de libre-échange avec la Chine plutôt que de « se prosterner devant les journalistes canadiens préoccupés par les droits de l'homme ». Lu Shaye préconise de dissocier les problèmes économiques et commerciaux de la défense des droits de l'Homme[5],[6].

Ambassadeur en France modifier

En tant qu'ambassadeur de Chine en France, il se distingue par son discours offensif et ses déclarations polémiques. Lu Shaye accuse le personnel soignant des Ehpad d'avoir au début de la pandémie de Covid-19 en France « abandonné leurs postes du jour au lendemain (...) laissant mourir leurs pensionnaires de faim et de maladie ». Ceci lui vaut une convocation par le ministre français des affaires étrangères ; c'est alors la première fois depuis les manifestations de la place Tian'anmen en 1989 qu'un ambassadeur chinois est convoqué par le Quai d'Orsay[7],[8]. L'ambassadeur explique ultérieurement que son intervention ne concerne pas la France[9] mais l’Espagne, où des personnes décédées dans des établissements similaires ont été retrouvées par l'armée[10].

En mars 2021, il prend pour cible le chercheur français Antoine Bondaz, chargé de recherche à la Fondation pour la recherche stratégique (en)[11]. Antoine Bondaz envoie au compte diplomatique Twitter de Lu Shaye le message « un gros, gros bisous à vous qu’ainsi qu’à vos trolls » en référence aux comptes Twitter pro-Pékin qui relaient le message des autorités chinoises[9]. Lu Shaye lui répond en le qualifiant de « petite frappe » et de « hyène folle ». La réponse de l’ambassadeur entraîne une protestation et désapprobation du ministère des affaires étrangères français, ainsi que (selon Le Monde) le « soutien [à Antoine Bondaz] de députés français de tous bords au Parlement européen »[9],[12],[13],[7],[8]. Dans un entretien donné simultanément au magazine chinois Guancha et au quotidien français L’Opinion, il assume son étiquette de « loup combattant » face aux « hyènes folles », en soulignant que l'important est de plaire à ses compatriotes chinois, quitte à mener une véritable guerre de l'opinion au niveau international[14].

Il est finalement rappelé par son gouvernement à l'été 2023 après ses déclarations sur les pays issus de l'Union soviétique (voir ci-dessous), qui allaient à l'encontre de la position chinoise[15].

Déni de la souveraineté des États de l'ex-URSS modifier

En avril 2023, Lu Shaye déclare dans une interview à la chaîne française LCI que les pays de l'ex-URSS n'ont pas de statut effectif en droit international car il n'y a pas d'accord international pour concrétiser leur statut de pays souverains[16]. Ces propos déclenchent une vive inquiétude dans les pays baltes, anciennes républiques soviétiques. L'Estonie, la Lettonie et la Lituanie convoquent alors les diplomates chinois en poste dans leur pays pour obtenir des explications. Le Quai d'Orsay convoque également Lu Shaye. Le ministère chinois des Affaires étrangères désavoue alors les propos de son ambassadeur, assurant qu'il ne s'agissait que de l'« expression de points de vue personnels »[17] et dit respecter le « statut d'État souverain » des pays de l'ex-URSS.

Le Monde publie le une tribune signée par près de quatre-vingt parlementaires européens réclamant de la ministre des affaires étrangères qu'elle déclare Lu Shaye « persona non grata[18] ».

Analyses modifier

Il est parfois qualifié de « loup combattant »[15] et incarne « le nouveau visage d’une diplomatie chinoise décomplexée face à l'Occident », fer de lance en Europe d'une « nouvelle génération de diplomates chinois qui mènent une guerre médiatique contre tous ceux qui critiquent la politique de Pékin »[19],[20]. Pour l'universitaire François Godement, la Chine applique une diplomatie plus agressive, ainsi il existe « une espèce de compétition entre les diplomates chinois pour être celui qui va le plus loin, le plus fort et il n'y a pas de doute sur le fait que Lu Shaye soit en tête »[8].

Notes et références modifier

  1. [vidéo] Thinkerview, Ambassadeur de Chine sans filtre ? Lu Shaye [EN DIRECT] sur YouTube, .
  2. Clara Arnaud, « Lu Shaye : un destin africain », Jeune Afrique, .
  3. a et b « Curriculum Vitae de l'Ambassadeur », sur Ambassade de Chine en France, .
  4. TG, « Chine : Lu Shaye, l'ambassadeur guère diplomate qui dérange le Quai d'Orsay », sur LCI, .
  5. (en) Kelly McParland, « Kelly McParland: China's ambassador has a simple message — give us what we want », sur National Post, .
  6. (en) Mike Blanchfield et Andy Blatchford, « Influential, misinformed Canadian media hurts China-Canada relations: envoy », sur National Observer, .
  7. a et b M.O., « Qui est Lu Shaye, « loup guerrier » et ambassadeur chinois en France ? », sur L'Obs, (consulté le ).
  8. a b et c Yves Calvi, « Chercheur insulté par l'ambassadeur de Chine : Lu Shaye est "coutumier du fait", dit un spécialiste », sur RTL, .
  9. a b et c Sébastian Seibt, « Quand l'ambassade de Chine se déchaîne contre un chercheur français », sur France 24, .
  10. AFP, « Coronavirus : La France entend être « respectée » par la Chine, affirme Jean-Yves Le Drian », 20 minutes,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  11. Coline Daclin, « Qui est Lu Shaye, l’ambassadeur de Chine en France, qui met à mal la diplomatie ? », sur RTL, .
  12. AFP et Reuters, « L’ambassadeur de Chine en France convoqué par le Quai d’Orsay après des propos insultants », lemonde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  13. Nathalie Guibert, « « Petite frappe » : quand l’ambassade de Chine à Paris s’en prend à un chercheur français », sur Le Monde, (consulté le ).
  14. Frédéric Lemaître et Nathalie Guibert, « L’ambassadeur de Chine en France et « la guerre de l’opinion publique » », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne Accès payant, consulté le ).
  15. a et b Henri Vernet, « Le très peu diplomate ambassadeur chinois en France va faire ses valises » Accès payant, sur leparisien.fr, (ISSN 1247-4282), p. 4.
  16. « « Ne répétez pas la propagande russe », demande un conseiller de la présidence ukrainienne à l’ambassadeur chinois en France », sur lemonde.fr, (consulté le ).
  17. Antoine Bondaz, Lu Shaye, pantin de Chine, franc-tireur.fr, 17 mai 2023
  18. « Madame Colonna, nous vous demandons de déclarer l’ambassadeur de Chine Lu Shaye persona non grata » Accès payant (tribune), sur Le Monde, (consulté le ).
  19. Patrick Saint-Paul, « Lu Shaye, l’ambassadeur qui fait dérailler la diplomatie entre Paris et Pékin » Accès payant, sur Le Figaro, .
  20. Christian Chesnot, « Qui est Lu Shaye, ambassadeur de Chine en France, "loup combattant" de la diplomatie chinoise ? », sur France Info, .

Lien interne modifier

Liens externes modifier

  • Lu Shaye sur le site de l'ambassade de Chine en France.