Première annexion française des États de Belgique

La Première annexion française des États de Belgique est la période d'occupation des Pays-Bas autrichiens et de la Principauté de Liège en 1792 et de la tentative d'annexion de ces territoires par la France révolutionnaire au début de 1792 jusqu'au retour des troupes du Saint-Empire romain germanique en mars 1793.

Annexion des Pays-Bas autrichiens

1792–1793

Drapeau
Informations générales
Statut République
Capitale Paris

Entités précédentes :

Entités suivantes :

S'ensuivra la seconde annexion française des États de Belgique en 1794 qui, elle, durera jusqu'à la fin du Premier Empire de Napoléon Ier, en 1814.

Les Pays-Bas autrichiens (1713-1794) modifier

Les Pays-Bas méridionaux désigne les territoires au sud de la république des Provinces-Unies (qui sont grosso modo les Pays-Bas actuels), soit ce qui compose aujourd’hui majoritairement la Belgique et le Luxembourg.

Ces territoires appartenaient aux Habsbourg d'Espagne de 1516 à 1714, puis, à la suite du Traité d'Utrecht (1713), la suzeraineté est transférée à la branche des Habsbourg d'Autriche et ils devinrent alors les Pays-Bas autrichiens. Ils étaient de plus en plus nommés les « Pays-Bas belgiques » en français et formaient un ensemble de principautés féodales dépendant du Saint-Empire Romain germanique, réunies depuis les ducs de Bourgogne, sous un même prince, les duchés de Lothier, Brabant, Limbourg[1], Luxembourg et Gueldre ; le marquisat du Saint-Empire ; les comtés de Flandre, Hainaut et Namur ; et les seigneuries de Malines, Tournai et le Tournaisis, devenu héritage de la maison d'Autriche[2].

En 1789, les réformes progressistes et centralisatrices (politiques et religieuses) brutales qu'impose l'empereur Joseph II du Saint-Empire provoquent le désaccord des États généraux des Pays-Bas et conduisent à une insurrection, la révolution brabançonne, puis à la création d'une éphémère confédération des États belgiques unis créée à la suite du traité d'union du entre une partie des états membres des Pays-Bas autrichiens (duché de Brabant, Gueldres, comté de Flandre, comté de Hainaut, comté de Namur, Malines), le pays de Loos et le grand-duché de Luxembourg étant toujours sous domination des troupes impériales. De son côté, Liège, indépendante des Pays-Bas autrichiens, a fait sa révolution, et une république liégeoise a été instituée.

Cependant, les États belgiques unis ne peuvent pas résister au retour des troupes impériales. Les différentes provinces sont reprises entre le et la fin de l'année. L'armée impériale reprend ainsi le pouvoir au nom de l'empereur Léopold II. Ce dernier intervint également à Liège pour restaurer l'Ancien Régime et rétablir le prince-évêque Hoensbroeck.

Pendant ce temps a lieu la Révolution française dès la convocation des États généraux le à Paris. Les révolutionnaires des provinces belges et de Liège se réfugient alors dans la capitale française et forment le Comité des Belges et Liégeois unis[3], le .

L'occupation française des Pays-Bas autrichiens (1792) modifier

La bataille de Jemappes.

Le , Le roi Louis XVI propose à l'Assemblée législative de déclarer la guerre au Saint-Empire. Après le vote des députés, la guerre est déclarée au roi de Bohême et de Hongrie, François Ier.

L'armée française se prépare à envahir les Pays-Bas autrichiens. Une légion liégeoise et trois légions belges composées de partisans belges et liégeois réfugiés en France se joignent à cette armée française.

Les premières rencontres entre les troupes françaises et les troupes impériales dans les Pays-Bas autrichiens tournèrent à l'avantage de des dernières :

Après la déclaration de guerre de la Prusse à la France, le , la défaite des Prussiens à Valmy, le renverse la situation.

L'armée française composée de 60 000 hommes, dont les régiments belges et liégeois, et conduite par le général Charles François Dumouriez franchit la frontière des Pays-Bas autrichiens. L'armée impériale les attend à Jemappes. Le , l'attaque en masse des troupes françaises met en fuite l'armée impériale commandée par Bender.

Pendant que les troupes impériales, composées de 18 000 soldats, battent en retraite vers la place forte de Luxembourg, le gouvernement évacue Bruxelles. Les Français entrent à Bruxelles le et poursuivent les impériaux dans leur retraite, Louvain, Tirlemont, Liège jusqu'à la Roer.

La citadelle d'Anvers tombe le , Namur se rend le . L'estuaire de l'Escaut, bloqué depuis 1648, et que l'empereur Joseph II avait tenté vainement de faire ouvrir[4] en 1782, est rouvert dès le . La plupart des provinces des Pays-Bas autrichiens et la Principauté de Liège sont "libérées" de l'occupation autrichienne pour une occupation française...

La gestion politique des provinces belges par la France (1792-1793) modifier

La Belgique sous Dumouriez (fin 1792) modifier

Les Français sont accueillis en libérateurs[5] par la population des Pays-Bas accablée par les réactions autrichiennes qui ont suivi les révolutions de 1789.

Dès le lendemain de la bataille de Jemmapes, des élections sont organisées en Flandre, dans le Hainaut, le Tournaisis et le Namurois afin d'y constituer des assemblées provinciales. Il existe toutefois des divergences de vues :

  • entre Dumouriez et le Comité des Belges et Liégeois unis : le premier souhaite l'élection d'une assemblée législative tandis que le comité donne la priorité à la formation d'un gouvernement provisoire.
  • entre les statistes belges et les Liégeois favorables au rattachement à la France.

Le , la Constituante française a déclaré dans un décret que la nation française renonce à entreprendre aucune guerre dans le but de faire des conquêtes ! De plus, le , la Convention nationale française déclare par un décret de promettre secours et fraternité à tous les peuples qui veulent recouvrer leur liberté.

Cependant dès le , Dumouriez s'oppose aux commissaires de la République envoyés par la Convention en Belgique, dont Danton et Delacroix tous deux partisans d'une annexion pure et simple des territoires belges à la France. En effet, Dumouriez se rallie à l'opinion majoritaire des Belges qui sont partisans d'une République indépendante[6].

Dumouriez envoya une lettre à la Convention pour faire part de ses succès, elle y fut lue dans la séance du . En voici le début : « Citoyen Président, depuis cinq jours, l'armée de la République s'est trouvée en présence des Impériaux ; elle a combattu tous les jours, et enfin la ville de Mons a été le fruit de la victoire. Nous y avons été reçu ce matin en frères ; la souveraineté du peuple y est la base de toutes les opinions ; chacun s'empresse de prendre les armes pour soutenir la cause de la Liberté[7] »

Cependant, les français changent de doctrine lorsque Brissot, qui parlait encore le d'une ceinture de républiques autour de la France, exhorte le 26 devant la Convention de reculer nos barrières jusqu'au Rhin.

Et cela, malgré l'intervention, le , de députés belges à la Convention française[8] qui demandent à ce qu'aucun traité ne soit conclu à moins que l'indépendance de la Belgique et du Pays de Liège ne soit formellement reconnue et établie.

Le Convention édite un nouveau décret, le , par lequel la France proclame la liberté et la souveraineté de tous les peuples chez lesquels elle a porté et elle portera les armes. cependant le texte détaillé du décret met en évidence une tutelle du peuple libéré jusqu'à la fusion naturelle avec le France[9].

Dès le , Dumouriez ordonne de procéder sans tarder à des élections le . Mais l'intervention des statistes neutralise ce processus et le décret du entre en vigueur le .

L'intégration de villes et de provinces de Belgique à la France (1793) modifier

Dès le , un décret de la Convention de France demande à ses commissaires dans la Belgique de venir la renseigner sur la situation dans le pays et décide l'envoi de commissaires nationaux dans la Belgique.

Le , des représentants provisoires du peuple libre de la ville de Louvain s'adressent aux députés de la Convention de France pour demander l'annulation du décret du et demander à la France de renoncer à la conquête de la Belgique[10].

Tandis que le , les citoyens Bosque, juge de paix, et Camus sont remplacés par deux nouveaux commissaires nationaux en Belgique, le citoyen Treilhard.

L'annexion de la Belgique est réclamée par Danton le dans une déclaration à la Convention où il exprime la doctrine des frontières naturelles de la France : Les limites de la France sont marquées par la nature, nous les atteindrons des quatre coins de l’horizon, du côté du Rhin, du côté de l’Océan, du côté des Alpes. Là doivent finir les bornes de notre République.

L'Assemblée générale des peuples souverains du Hainaut de Mons réagit également en refusant le décret de la convention du .

Le , la Convention française renvoie au Comité Diplomatique, la demande d'incorporation de la ville de Mons à la France !

Le , la Convention décide l'incorporation provisoire des trois légions belges dans les troupes de la république française.

À partir de , la République française intègre progressivement, via des décrets de la Convention, dans son territoire les provinces, villes, faubourgs et communes de l'État belgique, et cela toujours conformément au souhait du peuple souverain :

  • Le  : l'intégration de la ville, des faubourgs et de la banlieue de Bruxelles
  • Le  : la réunion du pays de Hainaut, sous le nom de département de Jemmapes (quatre-vingt-sixième département).
  • Le  : la réunion des communes composant le pays de Franchimont, Stavelot et Logne.
  • Le  : la réunion de la ville de Gand à la France.
  • Le  : la réunion de la ville de Florennes et de trente-six villages formant son arrondissement.
  • Le  : la réunion de la ville et banlieue de Tournai à la France.
  • Le  : la réunion de la ville et banlieue de Louvain à la France.
  • Le  : la réunion à la France de la ville d'Ostende, à la demande de son peuple, et de la ville de Namur, à la demande d'un membre. Cette dernière demande est renvoyée au Comité Diplomatique.
  • Le  : la réunion des villes et banlieues de Namur, Ham-sur-Sambre, Charles-sur-Sambre, Fleurus et Wasseigne à la France.
  • Le  : la réunion à la France des communes de Nerel, d'Aeltre, de Thouroult, de Blanckenberg, d'Etloc, de Damne et la banlieue de Bruges.
  • Le  : la réunion à la France des communes de Marquain, de Chin, de Tramegnies, etc (Tournaisis).
  • Le  : la réunion à la France du Pays de Liège à la demande de citoyens de Liège réfugiés à Paris et entendus par la Convention.

Le , les citoyens Danton, Delacroix et Robert se rendent en Belgique à la demande de la Convention.

Le , la Convention édite le tableau des divisions administratives de la Belgique en cantons, districts et départements.

La seconde restauration autrichienne (1793) modifier

Le , la Convention nationale française déclare au nom de la nation française que la République française est en guerre avec le roi d'Angleterre et avec la république des Provinces-Unies.

Le général Dumouriez reçoit l'ordre d'envahir les Provinces-Unies. Les troupes françaises s'emparent de Bréda le et de Geertruidenberg le .

Cependant l'armée impériale sous les ordres du prince de Cobourg s'est réorganisée pendant l'hiver et elle prend, le , la ville de Maastricht défendue par les troupes du général Miranda et occupe le , la ville de Liège.

Les Impériaux continuent leur progression vers Bruxelles et rencontrent le l’avant-garde de l’armée française près de Tirlemont. Le , la bataille de Neerwinden marque une défaite importante de l'armée française qui abandonne le territoire des États belgiques et entreprend une retraite vers les places du nord de la France. Le général Dumouriez décide de rompre avec la République française et rejoint les forces du Saint-Empire.

La restauration de l'ancien régime est complète dans les anciens Pays-Bas autrichiens et dans la Principauté de Liège.

L'empereur François II reprend la direction des Pays-Bas avec l'assentiment du peuple belge[11], dans un esprit d'ouverture tandis que le Prince-évêque Méan de Liège réprime durement cette révolution.

L'empereur François II désigne l'archiduc Charles comme gouverneur et le comte de Metternich-Winnenburg comme ministre plénipotentiaire des Pays-Bas autrichiens. Leur entrée à Bruxelles, le est un triomphe.

Notes et références modifier

  1. Le duché de Limbourg, actuellement pays de Herve, Fauquemont, etc. avec comme capitale Limbourg, ne correspond pas à l'actuelle province de Limbourg, jadis pays de Loos, faisant partie de la principauté de Liège et non des Pays-Bas.
  2. Calendrier de la Cour de leurs Altesses Royales Marie-Christine ..... et Albert, Bruxelles, 1792, p. 47 : « État des Pays-Bas. Les Pays-Bas Autrichiens, dont la Souveraineté réside dans la Personne Sacrée de S.M. l'Empereur et Roi de Hongrie et de Bohême, sont composés des Duchés de Lothier, Brabant, Limbourg, Luxembourg et Gueldre ; du Marquisat du St. Empire ; des Comtés de Flandre, Hainaut et Namur ; et des Seigneuries de Malines, Tournay et Tournésis » texte en ligne.
  3. Manifeste Des Belges Et Liégeois Unis, MDCCXCII
  4. p. 56 : « Joseph II va plus loin ensuite : il exige l'ouverture de l'Escaut. Cette fois, les États généraux (des Provinces-Unies), en proie à une violente émotion, s'adressent d'abord aux Anglais, qui, encore sous l'impression de la récente guerre, font la sourde oreille, puis à Louis XV. Celui-ci a la faiblesse de prendre leur parti, et l'empereur, ne voulant pas la guerre avec son beau frère, cède. L'Escaut reste fermé ».
  5. Mabille Xavier, ibid, p. 49
  6. Citoyen belge, Coup-d'œil sur les principaux points d'une constitution à adopter dans la République Belgique, décembre 1792.
  7. Jules Delhaize, La domination française en Belgique, Bruxelles, 1908, tome Ier, p. 280.
  8. Jean Baptiste Duvergier, le Collection complète des lois, décrets, ordonnances, réglemens et..., Volume 5, p. 85.
  9. Henri Pirenne, Histoire de Belgique, tome VI, 1926.
  10. Adresse des Représentants provisoires du peuple libre de la ville de Louvain à la Convention Nationale de France
  11. Lode Wils, Histoire des nations belges, chapitre VI.

Voir aussi modifier

Articles connexes modifier